22 juin 2016

Espagne - Immersion espagnole à Alicante

Alicante me semblait toute destinée, c'est une ville portuaire qui paraissait offrir de nombreux avantages, bordée de plages, jouissant d'un climat presque tropical en été, son vieux quartier historique entourant un Château médiéval, et une vie culturelle vibrante et diversifiée. Je connaissais Valencia et Barcelona au nord, et la Costa Blanca, au sud ne m'intéressait pas vraiment, paraissant un peu trop touristique et bétonnée pour justifier un séjour de 2 semaines. 



Je me suis retrouvé dans la salle de cours d’Enforex comme si je l’avais quittée la semaine précédente. Il y avait bien sûr un monde entre ma première journée de cours ici, et celle à Séville il y a 2 ans... cette fois-ci, je me sentais nettement plus en contrôle, plus confiant, moins stressé, plus enjoué et détendu. Après un rapide test écrit et oral, on m’a assigné au groupe B1 (niveau intermédiaire), et on s’est mis rapidement à l’étude du subjonctif, un temps de verbe qui laisse indifférent en français mais qui est très utilisé en espagnol.

 J’ai été surpris (et plutôt fier, mettons!), de mon niveau, pouvant tenir une conversation nettement plus aisément que mes collègues de classe, grâce aux multiples occasions que j’ai eues de pratiquer à Montréal, avec des profs privés, des amis ou des collègues de travail. J’ai entendu dire souvent que, même si on fait tous les exercices imaginables et qu'on apprend tout le vocabulaire par coeur, si on ne met pas nos connaissances à l’épreuve en se forçant à parler dès le premier jour, c’est peine perdue. Comme si le stockage d’information et l’utilisation orale de ces connaissances étaient deux modes complètement séparés. Après un certain temps, les deux se rejoignent, mais l’erreur la plus fréquente est d’attendre d’avoir en main toutes les connaissances avant de s’exprimer. C’est au contraire les essais-erreurs dans la conversation qui contribuent à développer l’aisance, selon moi.




Dans mon plan d’immersion espagnole, je me suis dit que ça ne ferait pas de mal de trouver un logement sur Airbnb qui, cette fois-ci, serait partagé avec les propriétaires eux-mêmes. C’est rarement mon premier choix de vivre avec des purs inconnus pendant aussi longtemps, on peut avoir des mauvaises surprises et on se retrouve alors avec aucun endroit où se réfugier pour avoir la paix. Mais les commentaires à la fois sur la chambre (spacieuse, avec salle de bain privée) et sur les deux hôtesses, Maggie et Michelle, étaient élogieux, avec raison!... les deux filles (originaires de l'Écuador et du Nicaragua) ont énormément ajouté à mon expérience alicantesque, en m’invitant à différents événements, organisant chez elles des 5 à 7, en me suggérant des idées de sorties et d’endroits incontournables à visiter… j’étais super content d’avoir eu la bonne idée de me sortir de ma zone de confort et d’accepter de me retrouver avec des parfaites inconnues. Comme je disais, ce n’est pas mon premier réflexe, d'autant plus qu'avec des moyens financiers suffisants, on opte assez rapidement pour le luxe d'un appartement privé, avec le moins de contacts imposés possibles. 
C'est une erreur que j'ai eu la bonne idée de ne pas commettre! 


Mes cours se terminant vers 13h30, chaque jour de la semaine, il me reste amplement de temps pour me détendre, visiter la ville, et profiter de ses nombreuses attractions… je dois dire que j’étais plutôt affamé en sortant de classe, et je me retrouvais rapidement sur une terrasse, mangeant à l’heure des touristes, un plat consistant souvent accompagné d’un (ou plusieurs) verre de vino. Sous la chaleur torride de l'après-midi, J'ai pris rapidement l'habitude d'aller m'écraser sur la playa del Postiguet à deux pas du centre-ville, pour me baigner, lire et faire une sieste avant de me lancer dans l'exploration d'un nouveau quartier de Alicante jusqu'à l'heure de l'apéro... inutile de dire que j'ai jamais autant, et si souvent, bu que pendant ce séjour de 2 semaines sur la Costa Brava! 








La folie des “hogueras

Dès mon arrivée à Alicante, je sentais que quelque chose se tramait. Plusieurs rues étaient bloquées, des larges portions de ruelles étaient parsemées de tables pliantes et de stages de musique, d'immenses et superbes sculptures en papier s’élevaient ici et là, représentant des légendes locales ou des célébrités, mais difficiles à déchiffrer puisque les informations étaient présentées uniquement en valenciano, le dialecte local dérivé du catalan. 
 Maggie m’expliqua rapidement que c’était le début des Hogueras, la grande fête culturelle de Alicante, qui devait durer toute la semaine… je pensais avoir mal compris, mais j’ai vite réalisé que non: la ville se préparait pour 5 jours (et 5 nuits) de festivités où les citadins allaient se retrouver tous les soirs, jusqu’aux petites heures, à festoyer, chanter, danser et faire exploser des pétards… sans compter les nombreuses parades, les bands de musiciens à moitié saoûls qui circulent dans les rues tôt le matin, je pensais virer fou à la fin de ma première semaine!! Ça me rappelait les Fallas de Valence, un peu plus au nord... un party de malades, qui se déroulait dans tous les coins de la ville (dont juste en bas du condo où j’habitais) jusqu’à 3h du matin, et se terminant par la flambée de toutes les sculptures en papier… les Fallas ne duraient qu'une seule nuit et m’avaient parues insupportables, alors imagine 5 jours et 5 nuits!!… 
 La dernière semaine, heureusement, fut beaucoup plus tranquille... pendant que les citadins dégrisaient un peu, j'ai pu apprécier encore plus le vieux quartier, maintenant libéré des fêtards et de la musique à tue-tête. Alicante est une ville de vacances et de partys, parfaite pour les jeunes ou les touristes attirés uniquement par le nightlife et les plages. Même si j'ai adoré mon séjour ici, il m'a semblé l'avoir vécu à travers le prisme d'une fiesta perpétuelle. La ville (comme plusieurs autres en Espagne) a énormément à offrir au niveau culturel et historique, mais plusieurs attractions ou curiosités se perdent au profit de la fête qui envahit ses ruelles. On semble même avoir misé sur cet aspect plutôt que sur la mise en valeur de l'architecture qui m'a parue, à plusieurs moments, fortement négligée et même laissée à l'abandon. 
 Mais c'est ma perception nord-américaine: je suis chaque fois sur le cul devant un monument de plus de mille ans d'âge, et j'arrive difficilement à croire que tout ne soit pas mis en oeuvre pour le protéger le mieux possible... bien sûr les Européens vivent entourés de vieilleries depuis toujours, on ne peut pas leur en vouloir d'être à boutte et de favoriser plutôt la modernité, les partys et les feux d'artifices!

















En préparant ce voyage avant mon départ, je suis tombé dans le piège de chercher à tout voir, à optimiser chacune des mes journées, couvrir le plus de territoire possible, me remplir la tête du maximum d’images… au point que, me connaissant, j'en aurais été épuisé à mon retour, et même déçu de mon expérience...
C’est drôle parce que même si je m'accrochais, jusqu'à la veille de mon départ, à cet horaire bien rempli, je sais pourtant que ce n’est pas la façon de voyager qui me convient. 
 J’ai finalement décidé de m’installer dans une ville, m’immerger, me fondre dans le décor, bien connaitre ses racoins, et découvrir la culture, la gastronomie, les subtilités d'un endroit précis, plutôt que de me garrocher d’une ville à l’autre pour collectionner les villes, comme des coquillages que je me dépêche de ramasser avant que la marée monte.
Développer mes connaissances de la langue, communiquer avec les gens de la place, me faire des nouveaux amis, tâter le poul de la région, me coller la face sur son histoire et sa culture… c’est pour moi la meilleure façon de voyager… 
 ...et avoir le temps! Bordel que ça vaut de l’or. Pas question de courir, c’est presqu’un luxe de passer un après-midi sur une terrasse à boire un bon vino blanco (et un deuxième), en regardant la foule qui s’active tout autour!

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