17 mai 2025

Allemagne - Munich et Karlsruhe

Les yeux collés sur la fenêtre de mon train, je regardais défiler la verte campagne bavaroise, et ses multiples pistes cyclables m'ont fait rêver! Je ne savais pas que les allemands étaient aussi fans de bicycles. 
Et l'ordre qui règne dans la campagne, dans les petits villages, vient vraiment me chercher! 
Le chaos a son attrait, pour un court temps, et je réponds mieux maintenant à l'ordre, aux choses qui fonctionnent, au raffinement surtout, au bon goût qui se traduit par un aménagement paysager, par un entretien des espaces verts, par un respect et une mise en valeur de la nature. Cette quête de la beauté a toujours fait partie de mes priorités, mais encore plus maintenant, peut-être que c'est l'âge?
Mais je valorise tellement l'espace et le silence qu'il me serait difficile maintenant de me retrouver et d'apprécier un endroit trop peuplé et bruyant...
  
Theatinerkirche

Asamkirche
Une église privée construite par les riches frères Asam au 18e siècle.

Sendlinger Strasse, une importante rue commerciale et culturelle du quartier Altstaadt.


Le coup de foudre n'a pas été immédiat pour Munich. La gare immense et bondée en ce vendredi après-midi, le bordel dans le quartier qui l'entoure, et le trajet pour me rendre à mon hôtel ne m'ont pas charmé. Mais je commence à avoir assez d'expérience maintenant pour donner une chance à une ville! J'ai lu et entendu tant de bons mots sur Munich, que je me doutais bien que la magie allait opérer en m'approchant du centre-ville historique... et comme de fait, c'est magnifique! 


Marienplatz, avec le Neues Rathaus (Hôtel de villeet les deux tourelles de la Fraunkirsche tout au fond (ici-bas)



Entrée vers l'immense Englischer Garten (Jardins Anglais)


À la Bayerische Staatsbibliothek (La Bibliothèque Nationale Bavarienne),  Une exposition d'illustrations japonaises "Colours of Japan", qui me rappelait le Japon où je me trouvais, un an plus tôt. 

J'avais trouvé le quartier parfait: Maxvorstadt! Plein d'étudiants, d'artistes, des dizaines de boutiques artsy, de multiples cafés et librairies. J'ai adoré arpenter ses rues et sentir cette vibe étudiante, jeune et dynamique, qui me rappelait un peu Montréal. Et comme pour Montréal, pour apprécier cette ville il faut trouver les quartiers qui nous parlent… difficile d'aimer la ville dans son ensemble. Munich fut passablement détruite pendant la 2e guerre, et on sent que l'emphase a été mise sur le centre historique (avec raison), laissant la périphérie se bâtir de manière parfois sketchy, sans âme. Je me suis retrouvé dans le petit parc devant le musée Pinakothek qui ne payait pas de mine, et j'en observais la façade en notant la reconstruction évidente, des briques de couleur légèrement différente pour combler les espaces détruits pas les bombardements. Intrigué, j'y suis entré et j'ai bien fait! Un musée assez exceptionnel, la plus grande collection d'oeuvres européennes du continent, avec un emphase mis sur les peintures dynamiques de Rubens.


Une pinacothèque vient du grec ancien et désignait à l'origine une galerie de tableaux. De nos jours, le terme est souvent utilisé pour désigner un musée de peinture, en particulier en Italie et en Allemagne.


Grosser Fischmarkt, Jan Brueghel (1603)


"Jenenser Student", Ferdinand Hodler (1908)


Landschaft am Genfer See, Ferdinand Hodler (1906)



The Massacre of the Innocents, Rubens (1636)
Les oeuvres de Rubens sont étonnantes de dynamisme et de mouvement... pour un animateur comme moi, c'est hyper inspirant!


 Je suis retourné ensuite vers Maxvorstadt, le quartier étudiant, des jeunes brandissaient un drapeau norvégien pour leur fête nationale, je me suis assis à une terrasse pour avoir l'expérience culinaire bavaroise: saucisses, pretzels, fromages, et bière locale… rien de trop léger, mais je ne suis pas souvent en Allemagne, alors vaut mieux en profiter! 
 J'ai marché lentement vers mon hôtel, retraversant le altstadt plutôt achalandé, et au final, je me suis dit que j'avais vraiment aimé Munich, contre toute attente, à l'inverse de l'impression première. On sait pas ce qui nous attend quand on donne sa chance à une ville!
 C'est toujours un bon signe quand les images d'une ville me reviennent en tête souvent après mon retour. On dirait que l'Allemagne passait un genre de test pour voir si sa culture, son rythme, me plaisaient assez pour pour me replonger dans l'apprentissage de sa langue. J'ai tellement "commencé" souvent à apprendre l'allemand dans les 30 dernières années, je souhaiterais cette fois-ci aller jusqu'au bout… on dirait que j'attendais d'avoir un coup de coeur pour la culture germanique/autrichienne, l'histoire, le rythme et la qualité de vie, et après cette saucette en Autriche, puis celle-ci en Bavière, j'ai cette envie d'approfondir sérieusement ma connaissance de l'allemand. 
Étant un fan de récits de voyages, je suis toujours surpris de voir le peu de littérature du genre couvrant l'Allemagne. Il y a tant d'écrivains, d'auteurs et d'artistes qui se pâment pour la France, l'Italie ou l'Espagne, mais pratiquement aucun ouvrage du même type qui décrit l'Allemagne de manière dithyrambique. Ça m'a toujours étonné, surtout concernant un pays européen aussi central, aussi diversifié. Comme si quelque chose dans  sa culture rebuttait les écrivains-voyageurs, qui préférent le traverser rapidement pour atteindre les douceurs de la Méditerranée. On pourrait comprendre cette réaction face à la littérature de la première moitié du XXe siècle, plusieurs voulaient se tenir loin de l'esprit belliqueux germanique, mais même les récits de voyages d'avant-guerres sont hyper-rares, ou peut-être peu traduits?



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Karlsruhe

Karlsruhe Palace

Un arrêt ici parce que je dois prendre une correspondance pour me rendre à Strasbourg, en route vers Lyon. Karlsruhe est un "hub" ferroviaire important, connectant plusieurs villes allemandes et françaises. C'était la seule raison vraiment de me retrouver ici. Mais j'ai décidé de m'y arrêter 24h, découvrir une autre ville allemande du sud, juste par curiosité. 
 "Karlsruhe" signifie "Le Repos de Karl" en allemand. La légende rapporte que le roi Karl III aurait fait le rêve de fonder une nouvelle ville, mais je préfère la version où il avait juste voulu construire un palace pour se reposer, loin de sa femme.
Je laisse mon sac à la consigne près de la gare, je monte vers ce qui semble être le quartier historique, mais je prends la mauvaise voie, à droite du zoo, et je traverse plutôt une zone un peu triste, beurrée de graffitis, les commerces fermés, des gens un peu étranges, et déjà je me demande ce que je suis venu foutre ici. Marchant vite, traversant un parc en construction, j'arrive enfin sur ce qui semble être la route principale, mais où tout est fermé en ce dimanche (fête du travail?) Je m'asseois à une terrasse plutôt vide devant laquelle se prépare un mini-spectacle, car je vois des clowns et des musiciens de fanfare. Rien pour me séduire. 
Un attroupement se forme autour et après quelques tounes commencent les discours. Plusieurs tiennent des banderolles que je tente de déchiffrer, mais je vois que tous les groupes sont représentés, les écolos, les gais, les anti-fachistes, les pro-démocratie… mais je n'arrive pas à comprendre le thème central. Je m'éloigne donc, après mon café pour me rendre au palais devant lequel se tient un "science fair" jeunesse, plusieurs stands où des enfants présentent leurs inventions, leurs découvertes, leurs expériences scientifiques... et je vois passer le chien-robot de Boston Dynamics que j'ai vu souvent sur internet et je suis subjugué! Moi qui aurais bien choisi la robotique comme champ d'étude si c'était à refaire, je suis fasciné par ces créatures qui semblent presqu'avoir une personnalité (et dire que ce n'est que le début!)


Je continue ma marche à travers le quartier et je découvre un autre regroupement de manifestants, brandissant cette fois-ci des drapeaux européens, avec discours et applaudissements. J'ai mon cellulaire en main pour tenter de traduire ce que je lis sur les banderolles, et une dame s'approche pour me donner un petit drapeau européen. (Je me dis que ça fera beau, collé dans mon journal de voyage!) Du même coup, le groupe se place en cercle, on fait jouer un air classique qui fait figure d'hymne national, et tous se tiennent par main. Me retrouvant dans le cercle, un drapeau européen à la main, on cherche à m'inclure.
"I'm canadian!!" je proteste. 
"Everybody is welcome!" me dit une dame qui me tire par la main vers le cercle. 
Je suis donc là, imposteur, tenu par la main par des fans de l'Europe, à la fois gêné et crampé de me retrouver dans une telle situation, à attendre que l'hymne national se termine!



photo: google maps

Une mention spéciale pour le Ast Art Café où je suis arrêté un peu par hasard, mais aussi parce que j'étais attiré par la sympathique terrasse sur une rue tranquille, endroit parfait pour un raffraichissant Aperol-Spritz.
Je me mets à jaser avec le propriétaire de l'endroit, Patrick, un français qui débarqua lui aussi par hasard dans cette ville il y a 3 ans, décidant de s'y installer et d'y ouvrir un café "artistique" qui déborde d'oeuvres d'arts, de meubles disparates repeints, d'objets de seconde main qui trouvent leur place sur les tables et les murs. Patrick est à la fois proprio, l'âme de son resto, le décorateur et sa mascotte... on a l'impression que les gens passent pour le voir et lui serrer la main, il connait tout le monde, et son look unique ne passe pas inaperçu avec son chapeau vissé sur la tête... "ma marque de commerce!" qu'il me dit.
 
Photo: Karlsruhe Puls

Il me raconte alors sa vie pendant au moins deux heures, et il y aurait de quoi faire un film... soldat pendant la guerre de Bosnie (il est d'origine macédonienne), écrivain, artiste-peintre, aventurier, homme d'affaires, père d'enfants qu'il ne voit plus... la liste est longue mais fascinante! Même l'existence de ce café où on se trouve semble passager... "si je dois foutre le camp, je laisse tout derrière car ça ne m'a rien coûté!"
Une vieille dame vient nous interrompre. Elle lui serre la main avec un air inquiet et ils se parlent allemand pendant quelques minutes. Patrick me dit qu'elle venait s'informer de son état de santé... il a en effet eu un malaise cardiaque il y a quelques jours et revient à peine de l'hôpital... 
 Une vie aussi remplie et débordante laisse ses traces... mais Patrick, cigarette et verre à la main, me donne l'impression qu'il ne changerait pas une seconde de son parcours. 
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Je redescends vers la gare, près de laquelle se trouve mon hôtel. J'ai un sourire et une légèreté différentes d'à mon arrivée. Encore une fois, comme toujours, une ville qui ne me disait rien au départ a eu le don de me faire changer d'idée! Peut-être pas toujours grâce à son histoire ou ses trésors architecturaux, mais parfois aussi par ses rencontres et les petites anecdotes imprévues, des souvenirs que j'emporte avec grand plaisir. 
(une autre anecdote-coïncidence: je me retrouve à Oman dix jours plus tard, et lors d'une excursion je fais la connaissance d'un couple d'allemands originaires de... Karlsruhe!)

13 mai 2025

Autriche - Innsbruck

Mon dernier arrêt italien est à Brennero (ou Brenner en allemand) à la frontière autrichienne, où je dois changer de train. La ligne Trenitalia s'arrête ici et c'est la compagnie ferroviaire ÖBB qui prend le relais pour entrer en Autriche.
La traversée des Alpes tyroliennes est à couper le souffle... toujours ce contraste de montagnes verdoyantes et de sommets enneigés, de villages nichés sur les flancs et de la beauté absolue... ce qui ne s'arrêtera pas à mon arrivée à Innsbruck, une ville exceptionnelle située dans une vallée entourée de montagnes immenses... dès les premiers pas, j'ai su que j'allais adorer cet endroit! Et plusieurs mois plus tard, les images de mon court séjour dans le Tyrol autrichien continuent de me hanter!





La magnifique Maria-Theresien Strasse




La Stadtturm (La Tour de la ville)


Au centre, la Goldenes Dachl (ou "Toit Doré")






Petite plage sur la rivière Inn (D'ailleurs, Innsbruck veut dire "Pont de l'Inn" en allemand)



Partout: propreté, ordre, calme, espace... une ville hors de l'ordinaire... 



Au Tiroler Landesmuseen, une expostion fascinante sur la culture tyrolienne... 
Ci-dessus, dans la Hofkirche, quelques-unes des 28 statues de bronze entourant le monument dédié à l'empereur Maximilien I.
Ci-dessous, une des nombreuses reconstitution de restaurants du XVIe siècle, qui donnent envie de s'arrêter pour une pinte ou deux. 



La vue "carte postale" des Bunte Haüser (Maisons colorées)





Par-dessus tout ça, j'avais un appartement parfait pendant mon séjour à Innsbruck!
Avec la vue ci-dessous du balcon arrière... 






12 mai 2025

Dans les Dolomites du Sud-Tyrol

Une journée qui aurait pu ne pas avoir lieu, à cause du temps incertain, de ma fatigue, et de la gang de kids bruyants attendant l'autobus pour se rendre au même endroit que moi... (à ce sujet, je suis surpris du nombre de fois où je me suis retrouvé en plein milieu d'une "classe-nature" un peu partout en Italie... on sort les enfants des écoles pour leur faire voir le monde, et c'est une bonne chose!... j'imagine!)
Mais quelle erreur ça aurait été de passer à côté de cette visite mémorable! Je suis vraiment content, encore une fois, de m'être botté le cul pour sortir de ma zone de confort et mettre les pieds dans les Dolomites!
C'est chaque fois surréaliste de voir des sommets enneigés quand il fait si chaud et qu'on pense avoir dit adieu à l'hiver pour plusieurs mois. À mesure qu'on approche du Parco Naturale Puez-Odle, je suis hypnotisé par ces montagnes si hautes qu'elles ont leur propre climat.
J'arrête à Sëlva où se trouve l'entrée du sentier menant au Parco, mais je prends le temps de traverser ce village presque complètement désert en ce temps de l'année... les hôtels, les chalets de ski, les restaurants, les boutiques sont fermées, la zone ne vit que durant la saison hivernale... quand la neige fond, ça devient un village fantôme. Mais même en ce milieu de mois de mai, l'air est frais, ça sent l'hiver.
 



















La pluie m'a empêché de me rendre jusqu'au Parc, les gros nuages sont apparus et n'ont laissé aucun doute sur ce qui allait se passer... les grosses averses ont commencé à tomber, suivies de grêle... bizarrement, j'avais pas prévu le coup et je n'avais pas apporté d'imperméable, ni rien de très chaud, et je me suis réfugié pendant une bonne heure sous un sapin assez dense pour m'empêcher d'être trempé. 



La région du Sud-Tyrol (ou Alte Adige en italien) a son statut autonome qu'elle cherche à préserver. Ça ne m'a pas surpris puisque tout ici semble loin de l'Italie, il s'y parle italien, mais l'allemand est omniprésent, et ils ont même leur propre dialecte qui est un mélange des deux (le "ladin"... et non le "latin"), presque complètement disparu depuis que le gouvernement fachiste de Mussolini en interdisait l'usage.